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Il y a 30 ans, la folie meurtrière du faux docteur Romand

Jean-Claude Romand procès
Jean-Claude Romand lors de son procès à Bourg-en-Bresse, le 25 juin 1996. © Stephane Ruet / Sygma via Getty Images
Clément Mathieu , Mis à jour le

ARCHIVES. Il y a 30 ans, le 9 janvier 1993, le faux docteur Jean-Claude Romand, rattrapé par ses mensonges, avait tué son épouse, leurs deux enfants et ses propres parents. Trois ans plus tard, Match avait assisté à son procès. Retour sur une affaire hors-normes...


Le 9 janvier 1993, Jean-Claude Romand avait tué son épouse Florence, leur fille de sept ans Caroline et leur fils de cinq ans Antoine, puis ses parents Aimé et Anne-Marie. Dix-huit années durant, le meurtrier avait trompé sa famille et ses amis en se faisant passer pour un médecin de l’Organisation mondiale de la Santé à Genève. Le «docteur Romand» vivait en escroquant des proches, leur promettant de placer leur économies en Suisse. Jusqu’à ce que la vérité menace d’éclater....

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Son histoire a été racontée par Emmanuel Carrère dans un livre bouleversant, "L’adversaire", notamment alimenté par des correspondances et des rencontres de l'auteur avec l’assassin.

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En 1996, notre magazine avait assisté au procès de Jean-Claude Romand, au terme duquel il avait été condamné à la perpétuité, assortie d'une période de sûreté de 22 ans. Après 26 années de détention, Romand a quitté la centrale de Saint-Maur en 2019 pour s'installer à l'abbaye de Fontgombault dans l'Indre, occupé par des moines bénédictins vivant en quasi-autarcie, pendant sa période probatoire de deux ans. Il est aujourd'hui libre, mais soumis à des mesures de contrôle.

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Voici le récit consacré par Paris Match à la condamnation de Jean-Claude Romand en 1996...

Découvrez Rétro Match, l'actualité à travers les archives de Match...

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Paris Match n°2459 du 11 juillet 1996

Romand, voici tes victimes !

"Jean-Claude Romand partait chaque matin à 8h30 accompagner ses enfants à l'école, Caroline, 7 ans, et Antoine, 5 ans, réunis ici au dernier repas d'anniversaire du petit garçon. Il les a tués dans leur lit, à coups de carabine. Florence Romand (debout) a eu le crâne défoncé avec un rouleau à pâtisserie." (Paris Match n°2459, daté du 11 juillet 1996)
"Jean-Claude Romand partait chaque matin à 8h30 accompagner ses enfants à l'école, Caroline, 7 ans, et Antoine, 5 ans, réunis ici au dernier repas d'anniversaire du petit garçon. Il les a tués dans leur lit, à coups de carabine. Florence Romand (debout) a eu le crâne défoncé avec un rouleau à pâtisserie." (Paris Match n°2459, daté du 11 juillet 1996) © Paris Match

Par Sabine Cayrol (enquête Victor Guitard)

Cette femme et ses deux enfants composaient la famille d'un homme considéré par tous comme un bon mari et un bon père, qu'un insupportable orgueil a transformé en quintuple meurtrier. En 1975, alors qu'il est étudiant en médecine, Jean-Claude Romand, incapable d'assumer son échec à l'examen de passage pour la troisième année, se réfugie dans un premier mensonge qui le conduira à une vie de dix-huit ans d'imposture, et à l'horreur. II s'invente une activité de chercheur à l'O.m.s. pour le compte de l'Inserm, dont le bureau est situé à Genève. II vit grâce aux économies de ses parents et à celles de son entourage, qu'il prétend faire fructifier. Personne ne soupçonne une telle double vie, jusqu'à ce jour de janvier 1993 où l'incroyable vérité est sur le point d'éclater. L'imposteur ne la supporte pas et, possédé d'une effroyable folie meurtrière, il tue son épouse, ses deux enfants et ses parents.

« Papa !» Un cri inhumain. Ce n'est pas l'ultime appel d'un enfant assassiné. Il ne trouve pas la quiétude glaciale d'une matinée grise, le samedi 9janvier 1993, mais traverse les murs écrasés de soleil du palais de justice de Bourg-en-Bresse, ce jeudi 27 juin 1996.

« Papa !» C'est lui, l'accusé, l'infanticide, le parricide, le quintuple meurtrier, Jean-Claude Romand, qui rugit. A l'évocation de ses crimes odieux, il vient de se jeter à terre. Il se tord en convulsions, se griffe le visage, grogne, gémit, éructe, jusqu'à lâcher ce hurlement incompréhensible. Pourquoi? Est-ce le fer rouge de la vérité, qu'il se cachait encore et que la cour l'oblige à révéler, qui lui imprime cette douleur intolérable ? Ou bien l'expression paroxystique d'une nouvelle simulation ? Il n'avait pas hésité, dans le passé, à s'inventer une tumeur au cerveau.

« Papa !» Pourquoi ? Pourquoi ce mot-là ? Est-ce la supplique effroyable de son petit garçon et de sa petite fille qui le hante, qu'il entend, dans le tourment que sa conscience lui inflige et qui il fit feu à deux reprises, qu'il interpelle comme si, revenu vers l'enfant innocent qu'il fut, il voulait qu'il se portât à son secours ?

Pourquoi ? Il n'y a pas de réponse. Alors, comment ?

1975. C'est l'année fatidique. C'est cette année-là qu'il s'éprend de Florence. Il la connaît depuis sa naissance - elle a deux ans de moins que lui - et c'est une cousine par alliance. Mais en 1975 il la retrouve, différente et toujours si belle, à Lyon, où elle vient d'entrer à la faculté de pharmacie. 1975, l'année de son premier amour.

1975, l'année de son premier mensonge. Il rate de 9,5 points son passage en troisième année de médecine. 9,5 points, c'est peu. Et, sans aucun doute, ce très bon élève qui a obtenu son bac C avec mention pourra rattraper ce retard à la session de septembre. Seulement voilà... Il ne passera pas cette session de rattrapage. Il se plâtre lui-même le poignet droit et se présente, ainsi irrémédiablement handicapé, à ses examinateurs. «Je me suis dérobé je ne sais plus pourquoi. Alors, j'ai dit à tout le monde que j'avais réussi. C'était mon premier mensonge. Est-ce par peur de l'échec, par orgueil, pour ne pas faire de la peine à mes parents ? J'ai préféré la fuite à l'examen. C'est là que l'imposture a commencé. Je ne pensais pas qu'elle allait m'entraîner si loin.» Un si petit mensonge. Un si léger décalage avec la réalité. Une si grande facilité à les faire admettre. Et pourtant, tout de suite, il faut élaborer des scénarios en jouant chaque rôle sans anicroche, cacher mille menus détails, échafauder au quotidien des parades pour se prémunir d'un avenir plein d'imprévus. Oui, tout de suite, car la vie continue

Engrenage. Jamais autant que pour ce mystérieux criminel ce mot n'aura eu un sens plus implacable. Romand, à chaque rentrée, suit les cours de l'année supérieure grâce à des polycopiés. Etudie comme s'il devait subir la sanction des examens qu'il ne passe évidemment pas. Annonce et fête régulièrement ses réussites en lin d'année universitaire avec Florence et ses parents. Florence, elle, passe normalement ses examens. Ils se fiancent en 1978 et se marient le 19 septembre 1980. Les parents de Jean-Claude, comme beaucoup de parents, même peu fortunés, fiers de leur fils, ce futur médecin, subviennent aux besoins du jeune couple d'étudiants jusqu'à lui acheter un petit appartement près de la faculté. Ils ont économisé depuis sa naissance, le 11 février 1954, dans ce seul but : l'aider à accomplir un destin prestigieux à leurs yeux. Aimé Romand n'avait que le certificat d'études et était, comme son père, garde forestier. En 1983, Jean-Claude « termine » ses études. Il annonce alors à sa femme, à ses parents, fous de joie, qu'il est engagé comme chercheur à l'O.m.s. pour le compte de l'Inserm. Evidemment, il ne perçoit aucun salaire. Pour justifier d'une rémunération, il continue à puiser dans les ressources et les économies de ses parents, qui pensent ne plus avoir à le subventionner. Bénéficiaire d'une procuration sur leur compte bancaire, Romand les manipule à sa guise. Si une question survient, il prétexte de fabuleux placements en Suisse. Un fils merveilleux qui veut assurer l'avenir matériel de ses parents !

La maison incendié de la famille Romand, à Prévessin-Moëns, dans l’Ain, trois jours après les meurtres.
La maison incendié de la famille Romand, à Prévessin-Moëns, dans l’Ain, trois jours après les meurtres. © Pierre BESSARD / AFP
Des preuves, dont le fusil du crime, lors du procès de Jean-Claude Romand, en 1996.
Des preuves, dont le fusil du crime, lors du procès de Jean-Claude Romand, en 1996. © Stephane Ruet/Sygma via Getty Images

Quelle fin Romand pouvait-il envisager ?

En 1983, l'usurpateur reste modeste dans ses prélèvements. Normal, au début d'une carrière on ne gagne pas beaucoup d'argent. Le 29 juin 1984, il vend l'appartement de Lyon, que son père lui avait offert, pour la somme de 300 000 francs. Entre 1985 et 1986, son oncle Jean-Claude Romand lui confie 100 000 francs, dont son neveu lui affirme qu'il tirera sept fois plus, grâce aux taux d'intérêt concédés aux chercheurs de l'O.m.s. Ses beaux-frères, Jean- Noël et Emmanuel Crolet, lui livrent, dans le même but et pour le même résultat, 10 000 francs chacun. En 1987, son beau-père, Pierre Crolet, lui remet les 378 000 francs de ses indemnités (il vient de partir à la retraite).

En 1988, il empoche 60 000 francs de sa tante Elizabeth pour payer ses gélules qui ne sont que des placebos. Toujours en 1988, après le décès de Pierre Crolet, le père de Florence, il obtient 1 300 000 francs sur la vente d'un bien appartenant à l'héritage. Il les « place » comme d'habitude au pays de cocagne. Comme en 1991, il « placera » les 900 000 francs que sa maîtresse, Chantai Delalande, a retirés de la vente de son cabinet dentaire. En tout, plus de 3 millions de francs en moins de dix ans, exonérés d'impôts. Sa femme n'était pas étonnée qu'il ne déclarât aucun revenu à l'administration fiscale française, compte tenu de son statut » de fonctionnaire international.

De toute façon, Florence ne s'étonne de rien. Elle ne peut pas joindre son mari sur son lieu de travail, sinon par l'intermédiaire d'un bip que Romand avait acquis pour parer justement à cette éventualité. Elle n'a jamais pénétré dans le bâtiment de l'O.m.s. Romand lui a seulement indiqué, de loin, la fenêtre de « son » bureau. Elle ne sait pas exactement quelles fonctions il occupe. Elle ne met jamais le nez dans les comptes du ménage. Tout ce flou reste pour elle anodin. C'était en souriant, séduite, qu'elle disait que son mari était d'un naturel secret.

Secret, certes. Même aujourd'hui, Romand ne parvient pas à éclairer d'une façon probante ce qu'il fit de ces cent dix mois de vacances. Dix ans de carrière à l'O.m.s., dont on peut penser qu'il s'accorde au moins quelques semaines de vrais congés justifiables par an. Trois mille deux cents jours d'errance. Il partait le matin vers 8 h 30 pour accompagner les enfants à l'école. Après, rien. Après, il n'avait rien à faire. Sa voiture était son antre. Les aires d'autoroute, les parkings de Genève, les lieux sans paysage de sa si longue attente. Mais attendait-il ? Qu'avait-il à attendre ? On attend un avenir. Son futur, comme un écrivain possède la destinée de ses personnages, il le construisait. Mais les auteurs, en général, connaissent la fin de leur histoire. Quelle fin Romand pouvait-il envisager ? E avait installé un sous-main dans sa voiture et, appuyé sur son volant, prenait des notes en étudiant des revues médicales. Et plus spécialement les informations relatives à « sa » spécialité : l'artériosclérose. A Ferney-Voltaire ainsi qu'à Prévessin-Moëns, il fréquentait de nombreux médecins, pharmaciens, dentistes. Il n'a jamais été pris en défaut. Ainsi passaient les jours et les jours. Toujours les mêmes. Sauf vers la fin, où il fit d'étranges escapades à Lyon. C'est là qu'il fréquentait de chaudes échoppes. Pour les années 1991 et 1992, ses séances dans des « salons de massages » et ses achats dans les sexshops s'élèvent à 24150 francs, dont 8 700 francs pour le seul mois de mars 1992. Romand, au procès, ne fournit pas d'explications sur cette déviation dans sa vie d'honnête notable. Il se contente de laisser tomber froidement, sur un ton ironique, à propos de cassettes pornographiques : « Personne n'aurait imaginé que je regardais tout ça.» Personne, en effet. Comme personne n'imaginait le reste. Et, même si certains connaissaient l'existence de sa liaison adultère avec Chantai Delalande depuis 1991, elle s'effaçait dans les brumes du néant des convenances provinciales. Une normalité, en somme.

Non, Romand était pour tous un bon mari et un bon père. « Le jour où Caroline est née, c'était le plus beau jour de ma vie.» C'est ce qu'il affirme à la reprise des débats, après sa crise de nerfs au procès. Puis il ajoute : « Elle était belle, et je l'ai tuée.» Oui, il l'a tuée, comme il a tué le petit frère de Caroline, sa femme, sa mère, son père, et même le labrador de ceux-ci qui était aussi le compagnon préféré de Caroline. Quand la présidente s'étonne qu'il ait tiré aussi sur le chien, ce chien qui, a priori, ne pouvait pas le juger, ne pouvait pas parler, il répond : «Je pensais à Caroline, et je me suis dit : "Je t'envoie ton chien favori avec toi."» La salle frémit. Comme si, avec l'évocation de cette mort subalterne, on touchait le fond de l'horreur. Pourquoi? C'est sans doute à cause de ça, de l'incompréhension. Pourquoi ?

L'engrenage. L'autre, celui des faits, celui qui mène à l'irréparable. Le 16 décembre 1992, Florence croise une voisine qu'elle ne fréquente habituellement pas, mais celle-ci est avec ses enfants, qui portent des tenues de fête et sont des copains de Caroline et d'Antoine. Alors, les deux femmes bavardent et, tout naturellement, Florence interroge la maman sur les costumes portés par ses enfants. Elle s'entend répondre : «Nous allons à l'arbre de Noël de l'O.m.s.» L'O.m.s., l'endroit où travaille Jean-Claude. Caroline et Antoine n'ont jamais été conviés à cet arbre de Noël.

Le 21 décembre, Chantai Delalande, qui a divorcé et s'est installée à Paris pour ouvrir un nouveau cabinet dentaire, réclame de façon plus pressante ses 900 000 francs. Rendez-vous est fixé au 9 janvier. Le 4 janvier, la mère de Jean-Claude s'inquiète. La B.n.p. vient de la prévenir par lettre d'un découvert de 60 000 francs. Elle téléphone à son fils pour qu'il lui fournisse une explication. L'engrenage.

Le 9 janvier 1993, Jean-Claude Romand a tué son épouse Florence, leur fille de sept ans Caroline et leur fils de cinq ans Antoine.
Le 9 janvier 1993, Jean-Claude Romand a tué son épouse Florence, leur fille de sept ans Caroline et leur fils de cinq ans Antoine. © AFP
Aimé et Anne-Marie Romand, les parents de Jean-Claude Romand, assassinés par leur fils, le 9 janvier 1993.
Aimé et Anne-Marie Romand, les parents de Jean-Claude Romand, assassinés par leur fils, le 9 janvier 1993. © AFP

Ses cinq victimes ont été tuées de dos

Le 5 janvier, Jean-Claude Romand se rend vers 17 heures à la pharmacie de son ami Jacques Cottin à qui il demande de lui fournir du phénobarbital. Il dit en avoir besoin pour des cultures cellulaires. Le 6 janvier, il part pour Lyon, où il achète, dans une armurerie, deux bombes lacrymogènes, une boîte de cartouches de 22 long rifle et un silencieux pour une carabine de même calibre. Le 8 janvier, vraisemblablement en fin de matinée, il achète au Continent de Ségny un rouleau à pâtisserie, deux jerricans, qu'il remplit d'essence à la station du magasin. Le lendemain matin, le samedi 9 janvier 1993, commence la journée de l'horreur. Une horreur telle qu'on ne peut que s'en tenir aux faits.

Le matin du 9 janvier 1993, entre 8 heures et 9 heures, il frappe son épouse avec un rouleau à pâtisserie pour la tuer alors qu'elle dort. Il rejoint ensuite ses deux enfants dans le salon, où ils regardent une cassette vidéo. Il demande alors à Caroline de monter dans sa chambre. Pour «jouer », elle met un oreiller sur sa tête. Jean-Claude Romand a pris sa carabine dans le grenier et tire dans le dos de sa fille à plusieurs reprises, en visant le coeur. Il la recouvre de sa couette. Il appelle son fils, Antoine, qu'il exécute de la même manière. Puis, il part à Clairvaux-les-Lacs. Jean-Claude Romand arrive vers 12 h 30 chez ses parents, où il est attendu pour déjeuner. Après le repas, il attire son père à l'étage pour examiner un placard. Alors que son père lui tourne le dos, il fait feu à plusieurs reprises. Sa mère, qu'il appelle ensuite, subit le même sort. Il tue aussi le chien, nettoie l'arme tachée de sang, et part à Paris vers 14 heures pour y rejoindre Chantai Delalande. Il y arrive vers 19 h 30 et la retrouve près de l'église Saint-Augustin, où elle avait accompagné ses deux enfants à la messe. Vers 20 h 30, Jean-Claude Romand et Chantai Delalande quittent Paris en direction de la forêt de Fontainebleau, où il dit que Bernard Kouchner les attend avec d'autres amis dans sa résidence secondaire pour dîner. Jean-Claude Romand a toujours dit qu'il fréquentait Bernard Kouchner. Il ne connaît pas Bernard Kouchner. Alors évidemment il tourne en rond dans la forêt de Fontainebleau, car il ne trouve pas la maison de Bernard Kouchner.

Jean-Claude Romand arrête enfin son véhicule au carrefour des Tronces, en pleine forêt. Il fait descendre Chantai Delalande du véhicule. Il lui demande de se tourner et de fermer les yeux pendant qu'il lui met un bijou autour du cou. Il l'asperge alors de gaz lacrymogène. Chantai Delalande parvient à se dégager, poursuivie par Jean-Claude Romand, elle le supplie de ne pas la tuer. Puis elle lui fait face. Il ne tue pas de face. Ses cinq victimes ont été tuées de dos. Il implore alors son pardon, cette folie devait s'expliquer par sa tumeur au cerveau. Cette maladie, il l'avait inventée aussi.

Pourquoi ? Les psychiatres se sont exprimés. Le verdict est tombé. Mais pourquoi ? Pourquoi un homme s'enferme-t-il de lui-même dans une spirale infernale ? Est-il un monstre ? Est-il fou ? Les fous ne sont-ils pas tous des monstres et les monstres ne sont-ils pas tous des fous ? Qui peut trancher une telle question ? Personne. C'est pour cela qu'il fallait s'en tenir aux faits. Uniquement aux faits. Il dit avoir voulu se supprimer, mais des suspicions subsistent encore sur cette volonté de suicide. Il dit qu'il aurait souhaité que la peine de mort existât toujours, mais elle a été abolie, et il le sait. La sentence que Romand applique à lui-même, c'est la mort. Mais il est déjà mort. Oui, le Romand du roman, celui qui a plus vécu dans la fiction que dans la réalité, est mort puisque, depuis janvier 1993, on a prouvé qu'il n'existait pas.

Jean-Claude Romand lors de son procès en 1996.
Jean-Claude Romand lors de son procès en 1996. © Stephane Ruet/Sygma via Getty Images

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